pouvoir × relation.
Salem peut influencer par la pensée la façon dont les autres le perçoivent, les liens relationnels et émotionnels qui se tissent entre lui et les autres.
Salem joue l'étudiant désinvolte et blasé. Le mec qui vient en cours une fois sur deux, et qui s'installe nonchalamment dans le fond de la salle sans vraiment prêter attention, plus concentré sur l'expression d'ennui qu'il se doit d'afficher soigneusement, ou sur les regards en coin qu'on peut lui jeter et qu'il met un point d'honneur à retourner ou à ignorer au gré de son envie. C'est le mec qui grommelle qu'il préférait être chez lui à jouer à des jeux vidéos, qui parle de grandes ambitions comme si le monde lui devait tout, mais qui n'a finalement ni passion ni réelles aspirations.
Salem joue les durs, de ceux qui traînent dans les rues comme s'ils en étaient les rois, et qui jouent la provocation pour se faire une réputation. C'est un yankee, même qu'il a un gang de mecs un peu paumés qui l'appellent « Boss ». Il a des vestes en cuir, du gel dans les cheveux, des tatouages tribaux sur le torse, des pulls à motif léopard et col de fourrure, et des bijoux bling bling à souhait. Ah, et il a une moto. Enfin, une mobylette parce que sa mamie n'a pas voulu de vraie moto, et du coup c'est un peu la honte mais il est quand même super fier.
Salem joue les Dom Juan de bas étage. Son assurance et son physique de beau gosse pourraient en charmer certaines, mais il faut avouer qu'il manque de subtilité — et que c'est un peu un salaud, aussi. Ça fait partie de sa petite mascarade. Il cherche à collectionner les conquêtes, à se perdre dans des relations superficielles, sans jamais s'impliquer. Et s'il n'avait pas découvert son pouvoir, ce serait probablement un solitaire. Mais, aujourd'hui, Salem est passé maître dans l'art des relations improvisées, aussi opportunes qu'éphémères. Il les invente et les efface à sa guise, selon ses besoins et ses envies, et ne laisse jamais aux autres le loisir de se rapprocher réellement de lui.
Parce que Salem, il se soucie avant tout de ne soucier de rien. Il se donne des airs, toute une attitude, et s'en sert comme d'une armure contre le monde. Parce que Salem, au fond, c'est pas si un si mauvais garçon que ça. Mais il est terrifié. Terrifié, et il ne sait même pas pourquoi. Il a ce goût amer dans la bouche, comme s'il ne pouvait croire en rien. Il se voudrait cynique, sarcastique, répète à qui veut l'entendre que le monde est pourri, que les gens sont égoïstes, comme pour se convaincre lui-même. En vérité, il a juste peur de finir par y croire quand même, et de se casser la gueule. Il préfère encore se saboter tout seul plutôt que de se montrer vulnérable.
Il est un peu perdu, sur l'Archipel. Le garage de sa mamie lui manque, ses gentils sourires et ses cookies, aussi. Il se demande s'il pourra la retrouver ici. Et puis ses potes. La jolie Walburga. Cet imbécile d'Eden. Mais plus encore, au fond, s'installe une inquiétude nouvelle. Celle de le retrouver. Celui dont il se souvient parfois, souvenir brumeux et troublant — gémissant sous l'étreinte de son désespoir.
Il préférerait ne jamais savoir.