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nom lazare hippolyte
âge 14 ans
univers d'origine slumberland + beyond memories
le pays des rêves où judas s'est endormi ω
& l'autre monde où lazare s'est réveillé ω
narcoleptique ω passe beaucoup de temps à dormir ω fait très souvent les mêmes rêves ω a été un garçon nommé judas, mort à 16 ans d'une leucémie aiguë ω rêve de sa vie antérieure ω orphelin, vit dans un internat ω a eu une (sœur?) clémentine ω un village en flammes ω womb ω a un coeur qui bat très fort ω lazare est malade ω mais ne va pas mourir (car il sait se réveiller)
arrivé depuis ω quelques semaines / mois - juste assez de temps pour errer dans les paysages surréalistes de l'archipel, à la manière dont les rêves défilent au travers de ses paupières closes ; et s'impriment en lui ces nouveaux horizons comme une esquisse inachevée (il est, à vrai dire, habitué aux songes éthérés - et de n'être rien de plus qu'un éphémère passager fait de verre)
mais pour lazare le temps s'écoule au rythme de la clepsydre du marchand de sable ; depuis son arrivée, les accès de sommeil se font plus rares - (remplacés par la morne léthargie du somnambulisme, certainement)
souvenirs ω lazare a toujours eu des troubles de la mémoire, même lorsqu'il était sur terre - confondant souvent rêve et réalité
il a, semblerait-il, préféré oublier - oublier la solitude et l'absence, la maussade répétition de ces crépuscules incessants ; mais parfois reviennent-ils, semblables à des songes - des bribes de réalité (lazare n'a jamais bien su faire la différence de toute façon)
impact ω certaines nuits, les astres du firmament semblent briller un peu plus fort ; (comme si, quelque part, une triste étoile veillait sur lui dans le ciel du soir)
les machines se sont mises à crier ㅡ tandis que l’acouphène vociférant de leurs plaintes sonnaient comme une (berceuse) à mes oreilles ㅡ
je me suis réveillé
c’était encore cet hôpital - les mornes néons y éclairent les longs couloirs d’une lueur bien triste
je ne sais pas très bien ce que je suis sensé y trouver, à vrai dire - je me contente à chaque fois de monter les escaliers qui semblent monter jusqu’aux étoiles ; au sommet, il y a juste une petite porte blanche dont la poignée en métal est très froide
elle donne sur un curieux planétarium - les planètes y sont bien différentes de celles qu’on apprend à l’école ; et la température si basse qu’on peut y voir notre respiration devenir des volutes de fumées à travers l’obscurité
au centre, il y a une petite fille assise face à moi, sur une étoile au halo blafard - son dos est courbé, et son visage est couvert par ses mains qui sont pleines de sang
elle frissonne (ses faibles sanglots s’évanouissent avec les lamentations des anges qui murmurent dans le lointain)
et alors que je m’approche d’elle pour la réchauffer - j’entends à chacun de mes pas le son de son cœur battre de plus en plus fort - elle lève la tête
(la petite fille n’a pas de visage - il n’y a qu’un torrent de sang qui s’écoulent de ses deux orbites vides - il rutile le long de ses joues et se répand sur le sol glacé)
elle soupire - et chacune de ses vocalises semblent écrasées au creux de sa poitrine par une myriade d’helminthes, qui grouillent péniblement sous sa peau livide (ultime mort)
elle m’a tout pris
et elle te prendra toi aussi
et avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, je me réveille toujours en sursaut - les jambes lourdes clouées au lit par les chevilles, je sens la transpiration coller mon t-shirt à ma poitrine lorsque j’inspire (encore le même rêve)
la petite fille - elle s’appelle clémentine
(j’ai l’impression de lui avoir confié quelque chose d’important) mais j’ai beau y réfléchir, je vois à travers la lucarne les étoiles danser dans le ciel et tisser la toile de mes songes clairs-obscurs - l’étoile du berger valser avec la lune, et mes songes me happer à nouveau vers d’autres infinités ;
alors que je sens à nouveau mon corps devenir faible et mon esprit rejoindre la silencieuse fanfare, monter à bord du train vers le lointain [...]
je m’appelle lazare, et je ne sais pas si j’existe vraiment
- je me sens comme pris au piège par une cage dont les barreaux sont doux comme les nuages (comme si j’avais volé à morphée un petit morceau de son paradis)
je me suis rendormi.
au milieu d’un immense désert au sable blanc, il y a une petite tombe en marbre - elle est parfois décorée d’un simple bouquet rouge (l’odeur des fleurs)
la tombe n’a pas d’épitaphe, mais je connais la vérité - car j’ai vu les fossoyeurs y enterrer judas
(judas, c’est moi)
j’ai aussi vu son cadavre desséché par le soleil être recouvert d’un linceul de baisers - ils rafraîchissaient ma peau, pansaient mes plaies incapables d’arrêter de saigner ;
(mais peu importe les vagues le salive n’ont-elle jamais réussi à éteindre le feu au creux de ma poitrine - la voleuse)
j’ai clos les paupières de judas du bout de mes doigts - et les fossoyeurs m’ont même demandé de fermer moi-même le cercueil (j’ai accepté car je savais qu’il n’y avait que moi)
au même moment au dessus de nos têtes, des vaisseaux spatiaux comme des épées de damoclès
et de tout là-haut, en tendant l’oreille, j’ai entendu le cœur de judas doucement lui murmurer
(clémentine, emmène-moi quelque part de beau) [...]
- elle n’a plus jamais réussi à rêver.
après l’enterrement, il y a eu une grande fête ; beaucoup de ballons se sont envolés vers le ciel, comme un cadeau pour les vaisseaux -
judas m’y a appris à danser - à vrai dire, je crois qu’on a tourné si vite que nos deux visages se sont mélangés (et le soleil a gravé au fer ardent les traits du visage de clémentine sur ma rétine - il m’a demandé de promettre de la dessiner lorsque je serai réveillé)
vers dix-huit heures, on a pris une photographie tous ensemble - mais sur le cliché tous les fantômes étaient à (mon) image
(j’ai souri pour apprendre à judas à rire - mais de son visage ne coulaient que de maigres larmes rubis - au travers, on pouvait voir son joli sourire timide ;
après cela, je n’ai plus jamais rêvé de judas vivant
c’est car, je l’ai lu dans son dossier, quand j’ai rêvé de l’hôpital -
judas est mort d’une leucémie quand je suis né.
c’était écrit en toutes lettres sur l’acte de décès, une feuille cornée et gribouillée (j’y ai dessiné le portrait de clémentine afin de ne jamais l’oublier, et j’ai emporté avec moi le papier comme s’il m’appartenait) voleuse, voleuse
[...]
j’ai compris le sens de tout cela quand j’ai rêvé de la sorcière pour la dernière fois.
elle se tenait au milieu d’un village dont il ne restait plus que des planches carbonisées, et un piètre clocher sur le point de s’effondrer (c’est si, si silencieux) ;
les cendres voltigeaient au gré de ses pas de danse - elle était vêtue d’une épaisse robe noire de deuil, et son maigre corps chancelait quand on entendait les os de sa poitrine craquer à chacun de ses sanglots
la sorcière - elle avait volé le visage de clémentine
et sa chevelure incandescente se confondait avec les volutes de fumée noires comme les ténèbres ;
je me suis approché d’elle - elle murmurait, alors que ses larmes aussi chaudes que de la lave fendait son masque d’acier ;
je suis désolée, désolée, si désolée [...]
(elle tenait entre ses mains le cœur de judas)
le cœur de judas s’était arrêté de battre depuis bien longtemps - il était noir comme les cendres du village calciné
(autour de nous, on voyait les planètes à travers la brume)
et inlassablement, elle le pressait entre ses doigts tremblants, recouverts de sang coagulé - elle était seule depuis très, très longtemps
la sorcière - la sorcière n’a plus de famille (elle crie - elle a semé la mort autour d’elle avec ses terribles maléfices - lazare! voleuse! voleuse! voleuse!)
[...] je n’ai jamais eu de famille non plus ;
à vrai dire - je l’ai déjà dit au docteur (mais il ne m’a pas cru)
mais je pense avoir une petite sœur et aussi une maman très triste ; on a été séparés il y a bien, bien longtemps (avant même que lazare n’ai ouvert les yeux pour la première fois)
je ne sais pas bien si tout cela est vraiment arrivé (mais si la vie a fait pire que de nous séparer alors - peut-être
nous reste-t-il le droit de rêver un peu ; )
j’ai posé ma main sur celle de la sorcière - elle m’a appelé judas et m’a serré très fort dans ses bras
(son étreinte était chaude et confortable - et j’ai vu marie sourire quand je lui ai dit mon nom, avant de me réveiller la corde autour du cou)
son sourire - il ressemblait à celui que j’ai dessiné à clémentine, en haut de l’hôpital, dans le petit planétarium, sur l’acte de décès que j’ai volé quand tout a commencé
j’aurais aimé pouvoir rendre visite à clémentine, et lui expliquer tout ce que j’ai réalisé (seulement je n’arrive plus à en rêver)
les fossoyeurs ont fauché la corde - et je suis tombé dans le parfait inachevé
[...] je me suis endormi
/ réveillé
(un nouveau dessin prêt à être colorié -
et de faire du rêve
/ la réalité)